Gros plan sur Marcello Gandini, portrait d’un créateur
BMW a voulu rendre hommage à Marcello Gandini en fabricant une copie de la BMW Garmisch qu’il avait créée pour Bertone.
En 2016, le Festival Automobile International a rendu hommage à Marcello Gandini lors de la soirée de gala à l’hôtel national des Invalides. Aujourd’hui, beaucoup reconnaissent Marcello Gandini comme l’un des plus grands designers du siècle. Cette année, BMW a ordonné la reconstruction de la Garmisch, un concept-car que Gandini avait dessiné chez Bertone.
D’ailleurs, c’est chez Bertone que Marcello Gandini a construit sa notoriété. Quand il arrive chez le carrossier, en décembre 1965, c’est pour remplacer Giorgetto Giugiaro qui vient alors d’être engagé chez Ghia. L’une des premières tâches qui attend le nouveau venu concerne le projet « 400 TP » qui doit déboucher sur la Lamborghini Miura en mars 1966. Il n’a pas de temps à perdre : Gandini produit plusieurs dessins à la mine de plomb avec sa manière caractéristique : nerveuse, sauvage, instinctive, un peu naïve. Ses croquis n’ont pas la perfection convenue des designers sortis des écoles d’art, mais une spontanéité propre à traduire des fulgurances.
Les premières créations de Marcello Gandini restent sages, mais le styliste ne tarde pas à révéler son originalité. En mars 1967, la Marzal ouvre le bal des provocations. Au Salon de Paris 1968, on découvre la saisissante Carabo, un volume monolithique, cunéiforme et aiguisé sur la base d’une Alfa Romeo 33. En 1970, Marcello Gandini va encore plus loin avec la Stratos. Il ne s’est préoccupé ni de législation, ni de fonctionnalité, ni de réalisme ; il a simplement sculpté un objet d’art.
L’un des talents de Marcello Gandini, c’est sa faculté d’adaptation. Il ne dessine pas seulement des voitures futuristes ou oniriques. Il sait être pragmatique et le montre en réalisant plusieurs modèles de grande série. Ainsi, il réinvente la Mini pour Innocenti ; son actualisation moderne et fonctionnelle est pertinente, mais elle sera injustement oubliée. Pour Citroën, il brosse la silhouette de la BX qui sortira en 1982. Plus précisément, il retouche un dessin initialement créé pour la firme anglaise Reliant et destiné à être industrialisé par Otosan en Turquie… Il y a aussi la Fiat X1/9, acérée comme un coin (1972), et l’unique Ferrari de série dessinée chez Bertone, la Dino 308 GT4. La liste des contrats est interminable…
Marcello Gandini, sous la bannière de Bertone, a poursuivi sa carrière en la parsemant de coups d’éclat beaucoup plus spectaculaires. Les sculptures se succèdent : Countach en 1971, Trapeze en 1973, Bravo en 1974, Navajo en 1976, Ascot en 1977, Sibilo en 1978… Marcello Gandini développe un style toujours plus incisif qui exprimait son radicalisme par les volumes comme par l’ornementation.
Marcello Gandin, individualiste forcené, finit par quitter le carrossier en 1979 pour devenir indépendant et poursuivre son œuvre dans la solitude de sa bastide du XVIIe siècle, bien cachée dans le val de Susa, en dehors du village d’Almese.
Dorénavant, Gandini traite directement avec les constructeurs. La signature de Gandini est apposée sur plusieurs machines de grand tourisme : la Lamborghini Diablo (1989), la Cizeta Moroder V16T (1991) ou encore le premier jet pour la Bugatti EB110 (1991). Toujours libre et indépendant, Marcello Gandini se marginalise. Dans une industrie qui se passe de plus en plus de consultants extérieurs, Gandini a de moins en moins sa place. Introverti et ténébreux, Marcello Gandini se souvient de son père. Il était pianiste, chef d’orchestre et compositeur. Parfois, on joue ses œuvres sans se souvenir de son nom… Marcello Gandini se reconnaît dans cette manière secrète et tourmentée de vivre sa passion.